Let the night fall

IMG_1006Le rythme de nos vies, la ville, l’alternance des saisons… beaucoup de choses font qu’on ne peut pas, ou plus, vivre au rythme du soleil. Dans certains pays, plus proches de l’équateur, cette vie basée sur le rythme de la nature existe encore. Au Costa Rica, par exemple, la durée de la nuit ne varie pas beaucoup entre l’hiver et l’été, aussi il est plus facile pour les Costa Riciens de s’adapter au rythme naturel de la journée, un rythme équilibré et stable tout au long de l’année : on se lève en même temps que le soleil, et lorsque celui-ci décline, on ne tarde pas trop et on va se coucher. En France, avec nos nuits de 6 heures en été et de 12 heures en hiver (j’exagère à peine), imaginez le bazar que ce serait si nos vies, notre travail, étaient basés sur le lever et le coucher du soleil ! Impossible.

Et pourtant, qui n’a pas rêvé d’hiberner pendant les longs mois d’hiver, comme le font les animaux? Quel enfant que nous avons été n’a pas ressenti une énorme frustration à devoir aller se coucher avant que le soleil n’ait disparu, à 22h30 au mois de juin? « Mais, maman, il est encore TÔT!!!!!! Il fait encore jour !!!… » Au Moyen-Age, ils avaient tout compris : en été, les paysans travaillaient des heures et des heures dans les champs, faisant des journées de 10, 12, 14 heures. En hiver, on restait chez soi, on « hivernait ».

Notre organisme, j’en suis sûre, est fait pour s’adapter à la lumière naturelle et au rythme de la terre. Malheureusement, nos vies, la société que l’on a construite et dont on a besoin, ne permettent pas ce respect du rythme naturel. Mais rien ne nous empêche, parfois, de revenir à ce rythme plus « originel ». Surtout ces jours-ci, avec l’été qui se profile, les journées qui s’étirent, la chaleur…

L’idée est simple : laisser le soleil se coucher, accueillir l’obscurité de la nuit tombante, sans s’imposer la transition par la lumière artificielle.
Nous avons presque tous cette habitude d’allumer la lumière dès que le soleil décline, comme si nous ne supportions pas la pénombre. C’est juste un réflexe, je le fais aussi. Le jour décline? Hop, j’appuie sur l’interrupteur, et c’est Versailles dans mon appartement, les 3 ampoules de la cuisine, les spots au-dessus du bar, les petites lampes dans chaque coin du salon, la guirlande lumineuse à côté de la porte, etc… Je ne laisse pas la nuit tomber, je préfère anticiper et prendre l’obscurité de vitesse. Et pourtant, rien de plus apaisant pour notre esprit, pour notre organisme, que de vivre la tombée naturelle du jour et l’arrivée progressive de la nuit. La transition naturelle, au rythme des éléments.

IMG_0951Plutôt que de brancher tous nos appareils électriques, et, pire, plutôt que d’allumer nos écrans (qui, par leur lumière blanche et puissante, envoie à notre cerveau un message complètement contradictoire : « Ah ah, tu croyais que c’était le soir et tu commençais à te mettre en veille? Non non non! Avec ma lumière blanche, hop je te fais croire que c’est à nouveau le grand jour et je te réactive puissance dix-mille!!! Gnark gnark gnark… » (oui, les écrans sont méchants), bref, plutôt que de céder à nos bonnes vieilles habitudes de terriens 2.0 ultra connectés, pourquoi ne pas, pour une fois, prendre le temps de laisser la nuit tomber ?

L’idée est simple : le soleil se couche tranquillement, je n’allume aucune lumière, je laisse la pénombre pénétrer dans l’appartement et mes yeux s’adapter à la lumière déclinante. J’accepte ce « entre chien et loup » si poétique et si traînant. J’aime vraiment ce moment, on croirait que le temps s’arrête, laissant suspendu le jour pas encore parti, la nuit pas encore arrivée, comme si la Terre n’était pas bien décidée, comme si la nature hésitait. Et puis fatalement, à un moment, on réalise que voilà, la nuit est bien là, tombée sans qu’on s’en soit vraiment aperçu, discrète et légère qu’elle est. Et la lune finit par apparaître elle aussi, si elle n’était pas déjà présente en plein jour, narguant le soleil qui lui, n’a pas cette chance de pouvoir être et ne pas être à la fois…

Accepter cette transition entre le jour et la nuit, laisser la pénombre s’installer… ça paraît tout bête, mais le fait-on assez ? Prend-on le temps d’arrêter le temps, dans nos soirées minutées, soirées dont on veut profiter de chaque seconde car elles sont trop courtes et nos journées de travail trop longues ?
Robinson râle un peu, parfois, lorsqu’il veut allumer la lumière et que je l’arrête. Mais lorsqu’il a plus le temps, le week-end par exemple, il apprécie aussi ce nouveau rythme, et on savoure ensemble les couchers de jour (l’orientation de notre appartement nous offre de magnifiques levers de soleil, mais pas les couchers ^^), les levers de lune, on prend le temps de regarder les rares étoiles qui ne se sont pas laissées intimider par la ville (ahhh, ces nuits étoilées à la campagne ou à la montagne , c’est autre chose !), on n’allume aucune lumière et on laisse la nuit nous envelopper. Ces moments sont magiques, lents et intenses à la fois, et toujours une source d’apaisement (le cerveau se calme), de sérénité (avoir la certitude de ne faire qu’un avec la nature, faire partie d’un tout) et de prise de conscience : on est bien, là… que pourrait-on désirer de plus ?

IMG_0994Ces moments suspendus et calmes me renvoient aussi, systématiquement, à nos souvenirs de voyage, aux couchers de soleils incroyables auxquels nous avons assisté dans des endroits magiques, la nuit tombant sur Los Angeles, le soir rouge et chaud sur Red Canyon, les milliards d’étoiles sur le lac Tekapo en Nouvelle-Zélande, la pleine lune phosphorescente près de Wanaka, le gros soleil orangé, déclinant, bordé de nuages anthracites sur les eaux de Tahiti, l’immense océan argenté aux reflets de cuivre de Playa Grande au Costa Rica … la nature me rappelle la Nature, la grande et sauvage, et me donne des envies d’évasion…

KAA-Etats-Unis (6)souvenir d’un coucher de soleil et d’un « lever de nuit » sur Los Angeles, il y a presque deux ans

Regarder la nuit, les étoiles, ne rien faire… un luxe à portée de tous, qui nous rappelle combien nous sommes petits, sur cette immense, puissante Terre.

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10 réflexions sur “Let the night fall

  1. Les nuits étoilées … C’est la seule chose qui me manque au quotidien en été en vivant en ville ! (Les espaces verts .. y’en a pas mal dans ma ville, mais pour les étoiles, pas moyen de tricher)
    J’envie ton balcon !
    Sinon plus prosaïquement j’ai un programme sur mon ordinateur : f.lux (gratuit) qui adapte la luminosité de ton écran dès le coucher de soleil (pour les jours où on ne peut pas déconnecter – je dois souvent travailler le soir).
    Belle journée 🙂

  2. Je trouve ton article vraiment dans l’esprit yoga.
    Et comme je te comprends.
    Dès que le printemps s’installe je prends plaisir à trainer mon chéri dans le jardin, une tisane à la main, pour s’assoir sur les marches qui mènent au jardin et regarder les étoiles dans la fraicheur des soirées (qui en appellent de plus douces).
    Je viens aussi de la campagne et ce qui me manque le pus dans mon environnement semi urbain ce sont les odeurs de foin et de chèvrefeuille qui flottaient dans l’air autour de ma maison d’enfance.

    • Ahh mais vous avez un jardin, super!!! La chance!
      Ce qui me manque de la campagne c’est aussi les odeurs, et le silence total de la nuit, ou alors les grillons en été. Et le noir complet, la nuit, qui permet de voir tellement plus d’étoiles!

  3. Tu m’as fait voyager 😊 Les soirs d’été j’aime observer les étoiles avec ma fille, j’aime beaucoup quand elle leur invente des noms farfelus ^^

    • Merci Andry 😉
      C’est tellement apaisant de regarder le ciel. Il y a toujours quelque chose à voir. Ici, à Lyon, on voit peu d’étoiles, mais beaucoup de traces d’avions, ou alors leurs petites lumières clignotantes aussi. J’aime bien les regarder, j’imagine où vont ces avions, et les gens à leur bord. Ça me fait voyager…

  4. Quelle jolie note ! Ce soir je squatte dehors ! Quand j’étais plus jeune avec mes parents on le faisait beaucoup , maintenant je ne prenais plus le temps …. mais ce soir je vais le refaire tu m’as donné envie avec tes jolies photos !

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