Je m’étais arrêtée un peu brusquement dans mon précédent article concernant l’école. Il commençait à être long et je n’avais plus assez de temps, je m’étais alors dit que la solution était peut-être de le couper en deux pour ne pas trop alourdir mon propos.
Me voici donc de retour avec la suite!
Tout d’abord, vous avez été nombreux/ses (et cela m’a beaucoup et agréablement étonnée) à me demander les références du livre dont je vous parlais et qui a été un déclic pour moi. Le voici :
L’ouvrage est très simple à lire, clair, et conçu à l’origine pour les familles, donc vierge de tout terme trop technique ou de jargon de l’Education Nationale. Une lecture digeste, en somme. Je la conseillerais à TOUT LE MONDE, car elle nous apprend beaucoup sur notre société actuelle, et sur les nouvelles familles/éducations d’aujourd’hui. Certains passages ont même apporté un éclairage nouveau sur mon enfance, et je ne m’attendais pas du tout à réaliser certaines choses si brutalement à la lecture de ce simple bouquin. Bref, tout ça pour dire que, me plonger là dedans a été comme une révélation pour moi, tant au niveau professionnel que personnel.
Ensuite, si le sujet des pédagogies dites « alternatives » vous intéresse, vous pouvez commencer par lire cet article assez clair et simple : ici. Ce qui est rigolo, c’est que c’est une de mes meilleures amies qui m’a envoyée ce lien, après qu’on ait discuté pendant des heures de tout ça, de ce « tournant » dans ma manière de voir et de faire mon métier. Mais elle, elle n’est pas du tout instit! Et pourtant, elle a été emballée par les idées, les conceptions de ces pédagogies alternatives qui portent un regard bien plus bienveillant sur TOUS les acteurs de l’éducation : enseignants, parents, et enfants. Alors dès qu’elle lit un article à ce sujet, hop elle fait un mail à ses amis et nous transfèrent le lien. Elle en parle autour d’elle, aussi, et notamment à des copains journalistes, car elle aimerait voir le sujet un peu plus présenté « au grand jour ». Ca me rend heureuse, ce genre d’initiative. Je me dis qu’il y a encore pas mal de gens qui veulent croire et qui se bougent pour faire avancer les choses, même en étant en dehors de l’Education Nationale, même en n’étant pas parent.
Pour ce qui est de ma rentrée, à proprement parler, je dois dire que j’ai très peu de temps pour moi, pour le blog ou pour Robinson, et que je ne compte pas mes heures de préparation de classe, d’attente à la photocopieuse, de veille sur les blogs de maîtresses d’école, de découpage/collage/affichage…
J’ai eu la chance d’obtenir enfin un poste à titre définitif, donc ça y est, j’ai MON école, celle où je vais (sans doute) rester plusieurs années. Ce qui est génial, c’est qu’elle est à côté de chez moi, en ville, et que j’ai le niveau dont je rêvais (enfin, presque). J’avais très envie de me lancer dans le CP, l’apprentissage de la lecture est un peu mon dada (professionnellement parlant, je veux dire. En vrai, j’ai d’autres passions…. ^-^). Mais c’est une grande école, 8 classes de maternelle et 11 classes d’élémentaire. Aussi, j’ai hérité du double niveau CP-CE1 (je me suis proposée, ça ne m’embêtais pas plus que ça). J’aime aussi beaucoup le CE1. C’est juste que le double niveau demande, forcément, le double de boulot. Il faut préparer une journée classe comme si on allait en faire deux. Et c’est CHRONOPHAGE. Mais je dois l’admettre, j’aime ça. Même si je connais de gros moments de doute et de rejet, ces derniers temps. Même si je rêve d’arrêter de travailler, même si je n’en peux plus des parents angoissés ou agressifs et des gamins perdus / découragés / manquant de confiance en eux.
J’ai essayé d’aménager ma classe comme un cocon douillet et coloré (les pauvres choupinous sortent de 3 ans de maternelle, et on leur met biiiiieeeeen la pression avec le CP, alors un peu de douceur et une ambiance rassurante ne leur font pas de mal). Je rêvais d’un coin bibliothèque confortable, comme un nid, un endroit qui leur donne l’amour des livres, le plaisir de la lecture, comme j’ai pu le connaître moi-même très jeune. Vous le savez, les livres sont une de mes passions, et s’il y a bien une chose qu’un enseignant peut transmettre spontanément, c’est ce qu’il aime. Alors je mise beaucoup là dessus. Je me dis qu’un enfant qui aime les livres, même s’il n’est pas scolaire, même s’il est « nul en maths » (story of my life), s’en sortira toujours. Et puis, dans le quartier où je bosse, l’environnement familial de mes élèves n’est pas toujours des plus sereins. Il y a des familles top, comme il y a des contextes difficiles et malsains. Lire peut représenter un refuge pour les enfants qui vivent cela ; se plonger dans un beau livre, dans une belle histoire, peut être tellement réconfortant…
Alors j’ai accroché des guirlandes de fanions, apporté une chauffeuse de mon salon, acheté avec mes propres deniers des petits meubles de rangement, une plante verte et un joli pot, de belles boîtes colorées, et quelques albums que j’aime particulièrement. J’ai dépoussiéré des tonnes de livres, étagères et autres objets qui traînaient déjà dans la classe, pendant trois jours j’ai agencé, déplacé, repensé, porté et assemblé, et surtout respiré beaucoup de poussière. A la rentrée, ma classe brillait comme un sou neuf, et étincelait de couleurs vives. J’étais contente! J’ai pris ces photos fin août, depuis j’ai progressivement punaisé de grands affichages colorés, j’ai re-déplacé les tables des enfants, et élargi le coin bibliothèque. Je m’y sens bien, dans ma classe. Les enfants aussi je crois. Mes collègues, quand elles passent, me disent souvent qu’elle est vraiment belle et agréable.
J’ai passé beaucoup de temps sur Pinterest à épingler des photos de classes américaines à la déco soignée, aux couleurs vives. Je me mets à la place des enfants, et me dis que ça doit être plus agréable aussi pour eux, d’être dans un bel endroit : je voulais qu’ils aient envie de venir, qu’ils se sentent bien dans ce lieu, qu’ils y trouvent de la sécurité, et un cadre rassurant pour apprendre. J’ai envie qu’ils aiment l’école, parce qu’aujourd’hui il est fréquent de croiser des jeunes qui rejettent l’école, ses normes et sa rigidité obsolète, et qui se marginalisent en partie à cause de ce rejet. Je n’aurai mes élèves qu’une année, peut-être deux, avant qu’ils ne changent de classe, mais je me dis que cela suffira peut-être pour, au moins, un ou deux d’entre eux. On ne sait jamais quel rôle on va jouer pour quelqu’un, quel impact on aura sur la vie d’un autre, rien n’est jamais sûr mais on peut essayer. C’est ce que je me dis, c’est ce que j’essaie de faire dans ma classe.
J’ai tout mélangé dans ce billet : éducations alternatives, déco de classe, réflexions pédagogiques… j’espère que je ne vous ai pas trop perdu(e)s!
C’était important pour moi de prendre un peu de temps pour vous présenter ce nouvel environnement, dans lequel je passe beaucoup d’heures en de moment. Et puis, on ne sait jamais, cela pourrait aussi planter des graines d’idées, engendrer des réflexions ou des débats, ou simplement encourager l’un ou l’une d’entre vous à aller voir ailleurs, à sortir du cadre de l’Education Nationale ou des grandes lignes directrices de l’éducation actuelle, et tout ce que je sais c’est que, depuis que je me suis un peu éloignée du chemin bien tracé sur lequel j’évoluais jusqu’à présent, je me sens bien plus en accord avec mes idéaux, et plus en confiance avec l’avenir. Et c’est tout ce que je peux souhaiter à quiconque passe par ici ! 🙂