Je porte ce que je couds

Dernièrement, j’ai beaucoup cousu. Je me suis laissée porter par un enthousiasme efficace et j’ai réalisé de nouvelles robes, un pantalon, et une blouse. Mon petit atelier, au sous-sol de la maison, avec ses lampes de table bringuebalantes, son grand bureau de fortune, et des tapis partout, m’accueille donc de plus en plus régulièrement pour des soirées entières derrière ma machine à coudre. Je lance des podcasts, me prépare un thé fumant, et me voilà partie, absorbée pendant des heures.

J’adore ce moment à moi, où, seule dans ma pièce tamisée, je me laisse transporter par la voix de Matthieu Garrigou-Lagrange (podcast : La compagnie des auteurs) ou de Jérôme Garcin (podcast : Le masque et la Plume), que mes mains agissent comme celles d’un automate, je me concentre sur les points de l’aiguille, sur le rythme régulier de la machine, sur le tissu qui glisse et avance métronomiquement. Je souris aux remarques des chroniqueurs du Masque, je m’offusque des assertions de certains spécialistes de La compagnie des auteurs, je suis dans ma petite bulle rien qu’à moi…

Quelle satisfaction j’ai eu en observant mon dressing ce matin : j’ai remarqué qu’un tiers de ma penderie au moins, était cousu main ! Je ne parle bien que de l’espace penderie, c’est-à-dire les blouses, robes et chemises de ma garde-robe, et non des étagères qui, elles, contiennent les pantalons, jeans et les pulls. Pour l’instant, je ne me couds que des robes et des blouses. Toujours le même patron ou presque, que j’adapte, modifie, et décline dans des tissus très divers. Cela va des petits carreaux vichy style nordique, aux grosses fleurs bigarrées un peu russes, ou encore du léopard, ou du lin bordeaux. C’est bien simple, ces derniers temps, je porte autant de fringues achetées que de vêtements fabriqués à la maison. Cela me motive énormément, j’ai encore des tonnes de tissus qui bien rangés dans mes étagères, des patrons à découvrir, des pièces déjà découpées qui n’attendent plus que l’assemblage… je ne suis pas prête de m’arrêter !

Voici quelques photos de mes vêtements faits main.

 

ROBE MARTHE ET CHÂLE LÉO

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Une robe cousue à partir du patron de la blouse Marthe, rallongée. Le tissu est un lin assez épais et lourd, aubergine. J’ai aussi découpé un grand triangle dans de la polaire léopard pour me faire un châle. J’avais en tête cette association aubergine/léopard depuis un moment, et j’aime beaucoup porter ces deux pièces ensemble !

 

PANTALON VELOURS

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J’ai déjà cousu trois pantalons à partir de ce patron japonais. C’est un modèle plus que simple, qui se porte large et flou. J’avais envie d’en avoir un plus chaud, pour l’hiver, je l’ai donc cousu dans ce velours chamarré que j’adore, un morceau de tissu que ma mère m’a donné il y a un moment déjà. J’aime porter ce pantalon loose et doudou avec de gros pulls en laine, ou ma marinière, et des Uggs bien chaudes. C’est la tenue confortable et douillette pour rester à la maison cet hiver !

 

MAXI-JUPE LÉO

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Coudre une jupe longue et large, c’est le truc le plus simple, pas besoin de patron. Il faut juste savoir faire des ourlets. Lorsque j’ai déniché ce tissu, polaire d’un côté, léopard moutarde de l’autre, j’ai immédiatement imaginé dedans une maxi-jupe chaude pour l’hiver. En une heure, la jupe était faite, et portée le lendemain, avec des motardes et un pull large noir, histoire de ne pas trop en rajouter… Elle est très facile à vivre, je pense qu’elle est en train de devenir un des basiques de ma penderie d’hiver.

 

BLOUSE EUGENIE

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Cette blouse Atelier Scämmit est le dernier patron que j’ai acheté et cousu. J’ai pris beaucoup de temps pour le faire car je me suis bien plus appliquée que d’habitude… Le truc génial, c’est que le patron est accompagné d’un tutoriel sur Youtube, un pas à pas extrêmement détaillé et indispensable pour faire de beaux biais, des coutures anglaises et des fronces réussies. J’aime énormément les volumes de cette blouse, courte et large, très féminine. J’ai envie de la décliner dans tous les tissus, toutes les couleurs, et surtout en robe, ce qui est très facile car il suffit d’ajouter un nouveau « volant » à la blouse pour la rallonger à notre convenance. Le tissu que j’ai choisi ici est le même que celui pour la robe aubergine, un lin épais, rose pâle cette fois. Peut-être un brin trop rigide pour la coupe de ce modèle, mais très joli tout de même…

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Je suis une vraie novice de la couture, croyez-moi, et je ne suis pas très minutieuse, donc mes créations sont toujours un peu à l’arrache, mais tant pis cela ne me dérange pas, j’aime les porter, ne pas les croiser sur quelqu’un d’autre dans la rue, et savoir que c’est moi qui les ai faites. Et surtout, je peux enfin choisir les imprimés les plus dingues, et élargir toujours plus les volumes ou les longueurs, bref, obtenir des vêtements exactement comme j’aime, sans être déçue.
Et vous alors, n’êtes-vous pas tenté(e)s par la couture ?

À très bientôt ! Et n’hésitez pas à partager vos patrons coups de cœur ou vos dernières créations, ou encore des modèles de vêtements que vous aimez et ne parvenez jamais à trouver en magasin et que vous rêveriez de vous coudre… je serai très curieuse de découvrir ça !

The book club 2018 – bilan

En 2018, j’ai lu un peu plus de livres que les dernières années, et cela me ravit ! Trente-et-une lectures au compteur, mais surtout, beaucoup, beaucoup de coups de cœur qui ont entretenu ma boulimie de lecture, pour mon plus grand plaisir (oui, je sais, les vraies dévoreuses de livres qui tiennent des blogs dignes de ce nom caracolent à 80 bouquins lus par an… °_° j’en suis loin ! )

En parallèle de ces romans ou BD papiers, j’ai aussi lu quelques fictions sur Wattpad (dont certaines de plusieurs centaines de pages, haletantes !…) et j’ai pris quelques jours en février pour relire mon premier projet de roman, d’environ 400 pages Word, ce qui m’a grignoté un peu de temps pour mes autres lectures.

Sans plus attendre, voici la liste des titres que j’ai pu inscrire dans mon petit carnet de bord de lectrice, mois après mois :

 

Des BD

Culottées, Pénélope Bagieu ♥♥♥

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Une BD incontournable et indispensable, pour tous les âges. Pénélope Bagieu choisit de montrer quelques non-héroïnes qui ont réellement existé, elle dessine et écrit des « portraits de femme qui ont choisi leur destin ». Elle propose 2, 3 ou 4 pages seulement par personnage, et choisit délibérément de montrer une synthèse de leur vie ou du moment de leur vie le plus emblématique. C’est captivant et intelligent, et surtout, inspirant. Ce que j’ai beaucoup aimé aussi, c’est l’après-lecture, lorsque j’ai discuté de cette BD avec des ami(e)s qui l’avaient lue, et qu’on comparait nos coups de cœur : telle ou telle femme nous a particulièrement marqué(e), et pour X ou Y raisons… C’est intéressant de constater que nos sensibilités nous portent tout(e)s vers des héroïnes très différentes. Certains destins des Culottées m’ont vraiment chamboulée, et pour un grand nombre de ces femmes incroyables, j’ai versé une larme !! Car, qui dit synthèse d’une vie, dit beaucoup d’émotions en quelques coups de crayon !
Pour moi, c’est un livre vraiment réussi, et surtout un beau cadeau à offrir ou à se faire (puis à prêter, beaucoup).

L’adoption, tomes 1 et 2, Zidrou et Monin ♥♥

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Cette BD m’a été conseillée par mes collègues de la bibliothèque de mon village. Je l’ai lu, j’ai un peu pleuré (je suis très sensible voilà je l’admets…) puis je l’ai prêté à Robinson, qui a été un peu chaviré, puis à mon père, qui m’a dit « oh, c’est triste, dis donc… ». Oui, c’est triste, mais c’est beau, et puis surtout c’est la vie. Il n’y a aucun héroïsme, aucun fantastique, aucun merveilleux dans cette histoire, juste une banalité poignante et émouvante (aux larmes, donc).

Les filles de Salem, comment nous avons condamné nos enfants, Thomas Gilbert ♥♥

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J’ai offert ce roman graphique à ma meilleure amie car notre enfance a été imprégnée d’histoires de sorcières et de magie noire. Adolescentes, comme beaucoup d’autres, nous étions fascinées par les sciences occultes, les pendules, les esprits, les exorcismes, tout ça… ( je suis sûre que cela ravive des souvenirs chez vous aussi, non?… ). Nous avions même un projet de film (oui oui, en toute simplicité ^-^) à propos d’amies qui découvrent leurs pouvoirs magiques et… et je ne sais pas comment c’était censé se finir car nous n’avons écrit et filmé que le début (donc, oui, il y a malheureusement une trace vidéo de cet ambitieux projet 🙂 …. ! )
Bref. Les filles de Salem a reçu d’excellentes critiques ; pour une novice de la BD comme moi, les sélections Coups de cœur d’Inter ou autres, sont toujours un vivier sûr où puiser de nouveaux titres. Ça n’a pas loupé, ce roman graphique se lit d’une traite, les images sont puissantes et évocatrices, le thème assez envoûtant et… édifiant.

 

De la littérature « young adult » ou jeunesse (mon guilty pleasure)

Nulle et grande gueule, Joyce Carol Oates ♥♥

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J’aime énormément Joyce Carol Oates, et je suis tombée sur ce roman jeunesse d’elle dans la petite bibliothèque de mon village. Ça se lit tout seul, c’est bien écrit et on reconnait la virtuosité de la plume de J.C.O. Ce qui différencie ce livre de ses autres écrits pour adultes, c’est qu’il est moins dense, plus accessible peut-être. Mais le thème traité reste dans la veine de ce que l’autrice aborde généralement : la violence des relations humaines, le mal, la résilience. Le tout d’un point de vue d’adolescents, personnages plus sensibles et friables encore que les habituels adultes qui peuplent ses romans. J’ai lu des critiques très dures sur internet, concernant ce virage « jeunesse » emprunté par Joyce Carol Oates, et je ne les trouve pas justifiées. Personnellement j’ai beaucoup aimé ce roman, qui m’a d’ailleurs fait un peu penser à la série 13 reasons why, qu’on a parfois trop rapidement cataloguée comme série « teenagers » alors qu’elle touche beaucoup plus largement qu’on ne pourrait le penser. Cela pose la question suivante : avoir pour protagoniste des enfants ou des adolescents range-t-il forcément un roman dans la catégorie jeunesse ?

Le cycle de La passe-miroir, les 3 tomes de Christelle Dabos :

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Les fiancés de l’hiver, tome 1 ♥
Les disparus du Clairdelune, tome 2 ♥♥
La mémoire de Babel, tome 3 ♥♥♥

J’entendais énormément parler de ce cycle de romans (jeunesse, encore une fois). Et je dois avouer que l’histoire de Christelle Dabos m’intriguait ; elle écrivait depuis longtemps, en parallèle de son job, elle faisait partie de forum d’écrivains en herbe, etc… et puis un jour elle a participé au Concours du 1er Roman Jeunesse organisé par Gallimard, et elle l’a remporté. Alors ce fut le début d’un tourbillon de succès pour Christelle Dabos et son histoire de mondes, d’arches et de clans maîtres de pouvoirs magiques. J’étais un peu dubitative au début de ma lecture, et puis j’ai du admettre que le style était remarquable ET original, que l’intrigue était prenante et l’univers fantastique créé de toutes pièces par l’autrice se tenait solidement. Bref, j’y ai cru, j’ai voyagé, je me suis laissée transportée et j’ai beaucoup, beaucoup, beaucoup aimé ces moments de lecture hors du quotidien. J’attends désormais le 4ème tome avec impatience.

Stony Bay Beach, Huntley Fitzpatrick

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Samantha a 17 ans. Sa mère est une figure politique locale. Leur maison est immense, immaculée, tout le contraire de celle des Garrett, les voisins que sa mère déteste. Ces derniers ont huit enfants et vivent dans un bouillonnant désordre organisé. Un jour d’été, alors que Sam les observe de son balcon, un garçon l’y rejoint : c’est Jase, le troisième enfant des Garrett. Commence alors pour Sam et Jase l’été des premières fois, mais aussi des secrets, qui ne peuvent rester bien longtemps gardés…
J’avoue, je n’ai acheté ce livre que parce-que j’ai craqué sur la couverture, veloutée et colorée. Je m’attendais bien à un roman très très teenager, je n’étais pas surprise. Je ne peux pas dire que la lecture était insupportable car je n’ai pas rechigné à m’y plonger, mais il faut avouer qu’elle n’a pas grand intérêt…

Mes nuits à la caravane, Sylvie Deshors

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Lucile a perdu sa mère adorée il y a quatre ans, et depuis, son père a sombré. Un jour, exaspérée, elle quitte la maison et s’installe dans une caravane, au bout du pré, dans laquelle sa mère aimait se réfugier pour peindre. Avec l’aide de trois copains, elle se construit un refuge, mais mène aussi l’enquête sur les raisons de la faillite du restaurant de ses parents… Portrait positif d’une bande d’adolescents, luttant contre la désespérance et l’ennui, dans un petit bourg du Limousin.
Là aussi, c’est la couverture qui m’a convaincue d’acheter ce roman – je l’ai d’ailleurs acheté le même jour que Stony Bay Beach, je devais avoir un besoin inconscient de lecture-doudou et de jolies couvertures pleines de poésie et de douceur ce jour là… – L’idée de départ de cette histoire est plutôt bonne, et j’avais envie de croire que le livre honorerait ses promesses. Malheureusement, même si je lui ai laissé une chance, l’histoire convenue et le style fade et quelconque ont eu raison de mes espoirs. Déception.
Je n’ai pas passé un mauvais moment en lisant ce livre, mais disons que c’est le genre d’histoire qui est aussi vite lue qu’oubliée.

Le plus bel âge (scénario), Claire Mercier ♥

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Il s’agit d’une relecture, quinze ans plus tard. Je ne sais toujours pas quoi penser des relectures de nos coups de cœur d’enfant ou d’adolescent. Car elles se transforment parfois en déception.
Ce petit livre, de la collection Page Blanche chez Gallimard (collection qui, malheureusement, n’existe plus mais qui proposait un choix intéressant et sophistiqué d’œuvres pour adolescents, des sélections littéraires impeccables loin des romans et séries un peu vulgaires qu’on trouve souvent adressés à ce public), m’avait énormément marquée durant mon adolescence. Je me souvenais vaguement du point de départ de l’histoire, du drame, et surtout de ce monde inconnu dont je ne connaissais pas la moitié des mots : l’intrigue prend place à Paris, dans des classes de khâgne, d’hypokhâgne et à Saint-Cyr.Autant vous dire que pour une gamine de quatorze ans, c’était une nouvelle dimension, une galaxie très lointaine qui était dépeinte dans ces pages. Je ne me rappelais plus vraiment de l’histoire et encore moins du titre, mais le souvenir de cette lecture m’a profondément marquée et j’ai eu envie de m’y replonger. Forcément, quinze ans plus tard, j’ai découvert ce qu’était ce monde parisien des études supérieurs, et les états d’âmes des étudiants pressurisés par les concours touchent peut-être moins la trentenaire, mère de famille que je suis aujourd’hui… N’empêche, je veux garder le souvenir de ma première lecture, le bouleversement et le mystère qui l’ont accompagnée.
Note : il ne s’agit pas à proprement parler d’un roman mais de la transcription d’un scénario. Le film Le plus bel âge est sorti en 1995 avec les tout jeunes Melvil Poupaud et Elodie Bouchez. Je ne l’ai pas vu, mais je crois que ce n’est pas un chef d’œuvre ^-^

 

Des romans néo-zélandais, américains, italiens, anglais…

Un ange à ma table, Ma vie mon île tome 1, Janet Frame (Nouvelle-Zélande)

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J’ai commandé ce livre (rare, et difficile à se procurer) car Jane Campion le cite souvent comme LA référence ; pour elle, Janet Frame est incarne l’âme de la Nouvelle-Zélande, qui a écrit LE roman que tout le pays attendait, à la fois poétique, sombre, et vrai. Janet Frame a écrit son autobiographie en trois volumes, et Ma vie mon île en est le premier volet. Elle y décrit très précisément son enfance et ses études, il y a de beaux passages, des choses très sombres aussi. Dans les tomes suivants, elle détaillera son internement en asile psychiatrique, événement de sa vie qui fit couler beaucoup d’encre en Nouvelle-Zélande et qui inspira crainte, pitié et profonde admiration à Jane Campion. Cette dernière décida même, plus tard, d’adapter Un ange à ma table au cinéma, et contribua ainsi à mettre en avant Janet Frame au-delà des frontières de son île.
Ce fut une lecture intéressante, mais je crois que j’attendais plus de… de Nouvelle-Zélande, de nature, de paysages, de culture autochtone aussi peut-être, et que les nombreux aspects de la vie domestique et de l’enfance chaotique mais studieuse de Janet Frame, n’étant pas les objets premiers de ma quête lors de cette incursion littéraire, ne m’ont pas captivée.

L’amie prodigieuse, Elena Ferrante (Italie) ♥
Le nouveau nom, Elena Ferrante ♥♥
Celle qui fuit et celle qui reste, Elena Ferrante ♥♥
L’enfant perdue, Elena Ferrante ♥

Le battage médiatique autour de ces livres et de leur autrice ne pouvaient pas me laisser indifférente, j’ai voulu savoir de quoi il s’agissait et pourquoi tout le monde s’emballait ainsi. Notamment mon père qui n’arrêtait pas de m’en parler avec des étoiles plein les yeux… ❤

Je suis comme tout le monde, je me suis laissée prendre au jeu et par l’histoire de ces deux fillettes italiennes qui vivent et s’aiment dans la misère et la violence. J’ai aimé les voir grandir et affronter leur destin, ou se laisser malmener par lui. J’ai aussi éprouvé quelque chose d’indéfinissablement doux et triste à la fois car cette Italie dépeinte par Elena Ferrante m’a replongée dans mes propres souvenirs, les vacances dans les Pouilles, dans la famille de ma mère. Inévitablement, Lila, Lena et ma mère (jeune) se sont superposées, les mères des jeunes filles ont fusionné avec les souvenirs de ma grand-mère, son accent à couper au couteau et ses tabliers fleuris, ses cheveux noirs et son duvet au-dessus des lèvres, son efficacité rude et sa douceur parfumée de talc. J’ai imaginé le visage de mes oncles incarner les personnages de Pascale, Gino, Stefano, Enzo, Nino… Cette immersion dans Naples peuplée de ces familles nombreuses a été un voyage à la fois littéraire, temporel et généalogique, presque. Un voyage doux-amer qu’il a été dur de quitter une fois les quatre tomes engloutis.

Testament à l’anglaise, Jonathan Coe (Royaume-Uni) ♥

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Tabitha Winshaw a 81 ans et elle est folle. Elle a perdu l’esprit un soir de l’hiver 1942 quand son frère préféré, Godfrey, a été abattu par la DCA allemande au-dessus de Berlin. Elle est persuadée que la mort de Godfrey a été commanditée par son frère aîné, Lawrence, qu’elle déteste. Tabitha commande alors à Michael Owen, un jeune homme dépressif, une histoire de la dynastie des Winshaw qui occupe tous les postes-clés dans l’Angleterre des années quatre-vingt. Il y a du jeu de massacre dans l’air d’autant que Tabitha n’est peut-être pas aussi folle qu’il y paraît.
Cela faisait un moment que ce roman me faisait de l’œil, et, même s’il y a eu des passages un peu plus laborieux que d’autres à lire (l’histoire est assez longue et convoque un nombre assez impressionnant de personnages…!), j’ai beaucoup aimé cette lecture, assaisonnée d’une pointe satirique de cet humour cinglant si caractéristique des anglo-saxons. Un bon polar qui ne se prend pas vraiment au sérieux, so british.

D’où viennent les vagues, Fabio Genovesi (Italie)

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Il y a des vagues qui viennent bousculer pour toujours les eaux calmes de la vie. Celle de Luna, une petite albinos, aux yeux si clairs qu’elle ne peut voir le réel ; celle de son frère Luca, grand surfeur, qui sillonne les vagues et traîne tous les cœurs derrière lui ; celle de leur mère qui pense que l’amour n’existe plus ; celle d’un mystérieux enfant arrivé de Tchernobyl qui parle un italien suranné.
Encore un livre acheté en même temps que les deux autres aux jolies couvertures. Ça devait être au mois de juin, je devais avoir sacrément besoin de soleil, d’été, de vacances… car elles ont bien ça en commun : de belles couvertures qui laissent présager la douceur et l’indolence de journées dehors, au soleil.
L’autre point commun que partagent ces trois romans, c’est que l’histoire n’a jamais été à la hauteur des attentes posées par ces jolies images.
Pourtant, c’était plutôt bien parti pour D’où viennent les vagues : un bon titre, un résumé alléchant, l’originalité du sujet et des personnages… Tous les ingrédients étaient réunis pour faire de ce livre un bon bouquin, voire un petit bijou. Comme ces livres bonbons dont on se souvient avec délectation et qu’on a hâte d’avoir assez oubliés pour pouvoir les relire avec une gourmandise non dissimulée.
Mais, malheureusement, D’où viennent les vagues n’en avait que l’aspect, et passe à côté de cette réussite. Ce n’est pas la faute de l’écrivain, qui a une jolie plume et beaucoup d’humour, sans compter toutes ces chouettes et originales idées. Je ne saurais pas dire ce qu’il manque, en réalité. Une âme, peut-être ?

Petits secrets, grands mensonges, Liane Moriarty (Australie) ♥

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Après avoir vu la mini-série adaptée du roman, que j’ai ADORÉE, j’ai eu envie de lire le livre de Liane Moriarty. Souvent, lorsqu’un bouquin est adapté au cinéma ou à la télévision, on y fait de nombreux changements, et j’ai toujours trouvé intéressant de pouvoir comparer les différentes versions d’une même histoire ; des personnages ajoutés ou supprimés, des prénoms modifiés, des détails changés, voire même, parfois, des fins différentes (comme par exemple pour l’adaptation BBC d’Une place à prendre, de JK Rowling). Je pensais trouver quelques changements entre ces deux versions de Big Little Lies, mais pas du tout ! L’unique différence est le lieu de l’intrigue, qui passe de l’Australie (pour le roman) à la Californie (pour la mini-série). Pourtant, cet énorme modification topologique, qui pourrait engendrer par effet dominos d’autres changements, rien n’est perceptible !
L’intrigue de la série était encore toute fraîche dans mon esprit, alors lire le roman ne m’a absolument rien apporté d’autre. Les actrices se sont immédiatement imposées devant chaque personnage papier, les décors d’océan, de plages et de fabuleuses maisons étaient encore bien présents dans ma tête, ne laissant aucune place à l’imagination, je n’avais pus rien à créer. Dommage. Cette lecture aurait sans doute pu être plus inoubliable (d’autant plus que j’ai trouvé le style de Liane Moriarty intéressant et sa perception des relations humaines, profonde et complexe), la prochaine fois j’espacerai un peu plus ma rencontre avec les différentes adaptations d’une même histoire !

Des polars / thrillers

Quand sort la recluse, Fred Vargas ♥♥

Que dire de plus lorsqu’on aime tout Fred Vargas ? Un nouveau roman qui sort, je le lis, je l’aime, je ne suis jamais déçue. Son style et ses personnages m’enthousiasment toujours autant, et les moments de lecture de ces polars sont, inévitablement, de douillettes échappées qui me laissent des souvenirs de lecture très agréables.

Trois jours et une vie, Pierre Lemaître ♥♥

Je ne sais pas si j’ai véritablement aimé ce livre. Mais je peux dire qu’il ne m’a pas laissée indifférente. L’intrigue, par elle-même, est marquante : la disparition d’un petit garçon, dans une petite ville, en France. J’aime beaucoup le style de Pierre Lemaître, l’auteur d’Au-revoir là-haut. J’ai trouvé que Trois jours et une vie se lisait vite, qu’on se laissait facilement prendre dans l’histoire de ces jeunes garçons, de leur famille, et de la ville qui tourne au ralenti. Le sujet et le décor sont assez glauques, mais pas poisseux. C’est là toute la magie des bons écrivains, qui savent doser intelligemment la part de sombre et de lumière qu’il faut glisser dans leur roman.

Le treizième conte, Diane Setterfield ♥♥♥♥

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Il s’agit d’une relecture, dix ans après la première.
J’avais eu un coup de cœur absolu pour ce roman anglais à l’ambiance gothique, dans la veine de ceux des Brontë ou de Wilkie Collins. Tous les ingrédients sont réunis pour me plaire : les personnages principaux, l’une libraire, les autres jumelles maléfiques, envoûtantes, énigmatiques. Et puis les personnages secondaires : un pâtissier, une vieille écrivaine, des amants maudits, un jardinier. Qu’ajouter à cela ? Des décors parfaits ? Effectivement : vieux manoirs hantés, landes désolées, petite ville anglaise, boutique de vieux livres oubliés, cottage douillet et jardins mystérieux. Une intrigue bien ficelée, enfin, qui surprend à coup sûr le lecteur (bon, je l’avais déjà lu donc pour moi, l’effet de surprise n’a pas pu avoir lieu la deuxième fois)…
C’est une réussite, ce roman, et j’attends encore que Diane Setterfield publie un nouveau livre… en attendant, je vais patienter en regardant l’adaptation BBC du Treizième Conte, avec les actrices de Broadchurch et Games of Thrones en sus !
Bref, j’adore ce livre, que je recommande à tous les amoureux de littérature anglaise.

 

Mes coups de coeur absolus, que je recommande chaudement !

Shibumi, de Trevanian ♥♥♥♥

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Que j’ai aimé ce livre ! Surprenant, original, déroutant, magistral, grisant ! Il ne ressemble à rien de ce que j’ai lu auparavant. Pendant ma lecture, je n’avais jamais envie de reposer ce bouquin, trop absorbée par l’histoire, trop plongée dans la vie incroyable du personnage principal. L’imagination de l’auteur me laisse sans voix ! J’ai du mal à croire qu’un seul esprit humain peut contenir autant d’idées, autant de fulgurances, autant de virtuosité. Je ne peux que vous encourager à tenter l’expérience vous aussi, et à ne pas vous laisser décourager par les premières pages. C’est un chef-d’œuvre.

Le ver à soie,de Robert Galbraith (J.K. Rowling) ♥♥♥♥ + La carrière du mal, de Robert Galbraith (J.K. Rowling) ♥♥♥♥

Les tomes 2 et 3 des enquêtes de Cormoran Strike m’ont absolument ravie ! Ces deux romans furent des délices, que j’ai dévorés bien trop vite, malheureusement. J’avais assez aimé le premier opus, et mon intérêt est allé croissant jusqu’à atteindre l’apogée au 3ème tome que j’ai A-DO-RÉ ! Les personnages sont attachants, Londres y est à la fois très réaliste et merveilleuse, avec un soupçon de magie, de mystère, propre à l’écriture de Rowling, et l’intrigue, enfin, est toujours haletante. Je suis subjuguée par l’art de la romancière à donner vie à ses personnages : j’aime Strike, depuis le début, j’ai appris à aimer Robin au fil des pages, pour finalement m’identifier beaucoup à elle, et c’est en ça que JK Rowling est très forte. Elle remporte mon adhésion à chaque fois. Quoi qu’elle écrive, elle m’emporte, me fait basculer de l’autre côté de l’imaginaire, et m’enlève tout envie de quitter ses histoires. Chaque livre convoque un univers vivant, palpable et envoûtant, je peux vous dire que j’attends le tome 4 (qui sortira en mars/avril, en France) avec impatience !

Couleurs de l’incendie, de Pierre Lemaître ♥♥♥

La suite d’Au-revoir là haut est aussi irrésistible que son prédécesseur. On retrouve quelques personnages du précédent roman, qui se révèlent enfin, comme de fragiles papillons. Ce livre est une gourmandise acidulée qui se déguste avec plaisir sans même qu’on s’aperçoive que les pages défilent et que la fin arrive trop vite.

Broadway Limited, Malika Ferdjoukh ♥♥♥

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Normalement, Jocelyn n’aurait pas dû obtenir une chambre à la Pension Giboulée. Mrs Merle, la propriétaire, est formelle : cette respectable pension new-yorkaise n’accepte aucun garçon, même avec un joli nom français comme Jocelyn Brouillard. Pourtant, grâce à son talent de pianiste, grâce, aussi, à un petit mensonge et à un ingrédient miraculeux qu’il transporte sans le savoir dans sa malle, Jocelyn obtient l’autorisation de loger au sous-sol. Nous sommes en 1948, cela fait quelques heures à peine qu’il est à New York, il a le sentiment d’avoir débarqué dans une maison de fous. Et il doit garder la tête froide, car ici il n’y a que des filles. Elles sont danseuses, apprenties comédiennes, toutes manquent d’argent et passent leur temps à courir les auditions.
Mon dernier coup de cœur de l’année appartient, encore une fois, à la catégorie « jeunesse » des librairies. Malika Ferdjoukh fait partie de mon Panthéon personnel des auteurs contemporains ; j’aime son style, sa façon de faire vivre ses personnages toujours loufoques, la fausse simplicité de ses histoires, les thèmes universels mais efficaces qu’elle choisit, et qui me parlent. Encore une fois, ces romans sont des mondes, des bulles dans lesquelles j’aime me réfugier ; les personnages deviennent familiers, comme des amis qu’il me tarde de retrouver en reprenant ma lecture. Je trouve ça incroyable cette faculté qu’ont certains auteurs à donner vie à des êtres et des lieux de papier. Si ça, ce n’est pas de la magie, en tous cas ça s’en approche…
(Note : il s’agit d’un cycle de plusieurs tomes, dont je n’ai lu que le premier pour l’instant. Le second est sorti en novembre 2018, et un 3ème semble prévu mais ce n’est pas pour tout de suite ! )

 

Les flops de 2018 :

Et puis, Paulette, Barbara Constantine

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J’avais aimé Tom, petit Tom, tout petit homme, Tom, de la même autrice. J’avais trouvé ça aussi onirique que profondément et innocemment réaliste. Je vous en parlais ici, si ma chronique vous intéresse.
Cet autre titre de Barbara Constantine ne m’a pas convaincue, on y retrouve le même style « feel good book » avec très peu de dialogues et une petite part de folie douce chez les personnages, mais à trop user de cette recette je trouve qu’elle tombe dans la caricature. On n’y croit plus, ou en tous cas, on n’a plus envie d’y croire. Dommage.

Comme une respiration, Jean Teulé (recueil de nouvelles)

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Mon collègue m’avait prévenue : parfois, être un auteur célèbre suffit pour être publié, quel que soit la qualité du nouvel ouvrage que l’on propose. Et en guise d’exemple, il m’a passé ce recueil de nouvelles du très connu et très vendu Jean Teulé. Mon avis a été semblable au sien : je n’ai trouvé aucun intérêt à cette lecture. Alors, oui, parfois certaines nouvelles étaient poétiques, littérairement intéressantes, mais je suis persuadée que si l’auteur avait été un illustre inconnu, la qualité et la pertinence de ce recueil auraient été bien plus questionnées avant la publication.

Nos adorables belles-filles, Aurélie Valognes

Nos-adorables-belles-filles

Bon, y a-t-il vraiment quelque chose à dire sur ce… « livre« ? J’ai été curieuse de voir à quoi ressemblait ce best-seller, dont l’autrice, sortie de nulle part et écrivant à ses heures perdues, a percé de manière fulgurante dans le monde si difficile d’accès de l’auteur édité (et pour cela, je l’envie, soyons honnêtes). Mais réaliser qu’un roman aussi médiocre et niais, bourré de fautes d’orthographe qui plus est, ait autant de succès en librairie, m’a très sincèrement dépitée et découragée. Est-ce ce genre d’insipidité qu’ont envie de lire les gens aujourd’hui ? J’avais l’impression qu’il s’agissait du scénario d’un épisode d’Une famille formidable, et ce n’est pas un compliment…

Karoo, Steve Tesich (abandonné après une centaine de pages)

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Ce roman a été encensé par la critique et conseillé par un ami, pourtant, je n’ai pas réussi à entrer dans cette lecture. J’ai vraiment essayé de m’accrocher, mais j’ai trouvé le personnage et l’intrigue aussi ennuyeux l’un que l’autre. L’histoire est poussive et vaine, le héros nombriliste et ses problèmes – ceux d’un riche égoïste qui se plaint beaucoup et ment comme il respire – ne m’ont inspiré aucune sympathie. J’ai préféré abandonner pour profiter de mon temps avec un autre livre.

Pastorale Américaine, Philip Roth (USA)

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La vie de Seymour Levov ressemble à un cliché noir et blanc des années cinquante, un portrait de famille figé dans le bonheur. Petit-fils d’immigré juif parfaitement assimilé à l’American Way of Life, une réussite sociale exemplaire, une épouse ex-Miss New Jersey composent le tableau idyllique d’une histoire lacérée au couteau. C’est à travers le récit des années fiévreuses de l’Amérique que le narrateur Nathan Zuckerman, personnage récurrent de l’oeuvre de Roth puisqu’il est Roth lui-même, évoque les failles mais surtout les revers du rêve américain devenu tas de cendres. Avec Pastorale américaine, l’auteur, chroniqueur de son temps, tord le cou aux mythes d’un autre âge, certes avec un brin de nostalgie.
Ce roman a reçu le prix Pulitzer, et il est mon premier du mythique Philip Roth. Apprenant la mort de l’auteur, en 2018, je me suis rendue compte que je n’avais jamais lu aucun de ses livres. Mes collègues, grands lecteurs, m’ont donc prêté celui-là. Eux l’avaient beaucoup aimé. Moi, eh bien, moins… Je ne cache pas que j’ai eu énormément de mal à lire ce livre, je l’ai trouvé long, laborieux, et un grand nombre de passages m’ont découragée (notamment toutes les descriptions de la fabrique de gants en peaux… Éprouvant !). Je n’ai pas compris l’intérêt du livre, certes remarquablement bien écrit, mais parfois trop érudit et compliqué, peut-être, pour moi.

 

Il m’a fallu un mois pour rédiger ce billet ! Ouf ! Chroniquer 30 lectures d’un coup, quel travail ! Idéalement, j’aimerais revenir à des chroniques mensuelles mais je sais déjà que le temps me manquera…
J’aime tout de même bien ce récapitulatif qui me permet d’avoir une vue d’ensemble sur tous les livres passés entre mes mains une fois l’année achevée. C’est intéressant de se souvenir de l’état d’esprit dans lequel on était durant la lecture, ou de laisser reposer les ressentis pour réaliser qu’on a finalement plus, ou moins, aimé que ce que l’on a cru d’abord.
Avez-vous eu, en 2018, des coups de cœur à me conseiller ?
Et des titres qui vous ont déçu(e)s ?

À bientôt !